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En ce début de saison 2015, nous tenions à rendre hommage à l’une des figures de proue de l’équipe de France de vitesse, qui a raccroché ses rollers à la fin de l’année dernière.

Justine Halbout est une athlète d’exception à plus d’un titre. D’abord, elle n’a jamais quitté les couleurs du 2APN Avon, depuis sa première licence à 3 ans en 1990 ! Ses qualités de battante l’ont menée plus d’une fois sur la plus haute marche du podium en France – jusqu’au titre de championne de France du marathon acquis en octobre dernier à Brétigny. Elle a défendu les couleurs de l’équipe de France dans toutes les catégories d’âge, et jusqu’à la sélection Senior, avec laquelle elle a pris une quatrième place au championnat du monde de Yeosu en 2011. Elle ne le dit pas assez, mais en 2011, elle a aussi succédé à Lilian Thuram dans le rôle de marraine de la Ligue départementale contre le cancer. Interview en forme d’hommage.

« L’envie et le plaisir m’ont toujours guidé »

La saison vient de commencer, et ça sera donc sans toi…

Oui effectivement. J’avais décidé de raccrocher mes rollers à la suite du championnat du monde à Rosario en novembre dernier. C’est désormais chose faite.

Quand est-ce qu’on décide d’une fin de carrière ?

Ce n’est pas une décision prise du jour au lendemain. C’est une accumulation de plusieurs éléments, mais j’ai mûri cette décision depuis quelques années. J’avais déjà pensé à m’arrêter après les mondiaux d’Oostende, mais plusieurs raisons m’ont poussé à tenter de relever le challenge de l’année 2014 ! La difficulté tout au long de ma carrière a été de concilier l’université puis le travail avec les entraînements. En ayant choisi de poursuivre un cursus scolaire puis universitaire « classique », je n’ai jamais bénéficié ni d’aide, ni d’aménagement scolaire pour m’entraîner. Il a donc fallu jongler avec les différents impératifs pour s’octroyer des créneaux d’entraînement. Mais l’envie et le plaisir de patiner m’ont toujours guidé ! Tout au long de ces années, j’ai essayé d’optimiser chaque séance pour progresser et préparer les échéances internationales. Je n’ai jamais pu m’entraîner autant que mes adversaires, mais j’ai misé sur la qualité de mes séances pour tirer mon épingle du jeu !

« Je ressens malgré tout le besoin de me dépenser »

Cet hiver, tu as pris le temps de te retourner sur toutes ces années sportives, ou bien tu as continué à foncer ?

Dès le lendemain de mon retour d’Argentine, je suis retournée travailler donc il a fallu rapidement se réadapter à la vie « quotidienne » après trois semaines à l’autre bout du monde dans un univers bien différent ! Je n’ai pas eu l’occasion de regarder dans le rétroviseur et je n’en ressens pas le besoin pour le moment. J’ai profité pleinement de chaque moment passé au bord des pistes pendant toutes ces années. L’ambiance des compétitions me manquera certainement car c’est cette adrénaline de la course qui a toujours été mon moteur ! Je ressens malgré tout ce besoin de me dépenser et l’alternative toute trouvée a été celle de la course à pied. Je commence à faire quelques courses et découvre un nouveau milieu, de nouvelles personnes. C’est une expérience différente mais toute aussi enrichissante !

Quand on a goûté aux joies du roller, on ne peut pas vraiment s’en éloigner trop longtemps, si ?

Ce serait mentir que de dire que mes rollers me manquent. Je n’ai pas rechaussé depuis le marathon du mondial en Argentine et je n’en ressens pas le besoin. J’aurai l’occasion de les remettre à quelques occasions dans la saison. Je participerai à des courses que je n’ai jamais eu l’occasion de faire, comme les 24H du Mans. J’ai hâte de pouvoir découvrir cet événement de l’intérieur et de partager cela avec des amis de longue date.

« Les Jeux Mondiaux à Cali resteront mon dernier grand souvenir »

Quels sont les meilleurs souvenirs que te laissera cette carrière si longue ?

Il y en a eu beaucoup. Je garde d’excellents souvenirs de mes années Cadette et Junior où j’ai pu évoluer en équipe de France avec des amies proches. Mon premier championnat d’Europe senior à Cassano d’Adda (Italie) fut une expérience très enrichissante auprès d’athlètes expérimentées telles qu’Angèle Grandgirard et Nathalie Barbotin Audoire. De plus, les excellents résultats collectifs comme personnels (6 médailles) y ont naturellement contribué. Ma quatrième place au Mondial en Corée en 2011 a été un déclic et m’a démontré que je pouvais atteindre le top 5 mondial. Cela est resté ma principale source de motivation ! Les Jeux Mondiaux à Cali resteront mon dernier grand souvenir car, outre la grandeur de l’évènement, l’engouement colombien et les résultats, partager cet événement avec ma sœur reste quelque chose de fort.

C’est possible qu’il y en ait eu des mauvais ?

Bien sûr ! Qui n’a pas connu de déception au sortir d’une course ? Le sport de haut niveau est exigeant et injuste parfois… Une carrière est faite de hauts et de bas, mais il faut se servir de ces échecs pour rebondir et en tirer des enseignements durables. Ma plus mauvaise expérience reste sans aucun doute le mondial 2009 en Chine où je n’ai pas été à la hauteur de l’évènement. A la suite de ce championnat, j’ai raccroché mes rollers pendant cinq mois et je me suis beaucoup questionnée sur la suite de ma carrière. Je me suis ensuite persuadée de ne plus revivre un tel calvaire et j’ai abordé différemment chaque compétition et ma manière de m’entraîner. Un mal pour un bien en quelque sorte…

Si tu devais te définir en tant que sportive, quels seraient les mots que tu emploierais ?

JOKER ! Je laisse le soin aux autres de répondre à ma place !

Personne n’est irremplaçable comme on dit. Comment analyses-tu la situation du roller de vitesse féminin aujourd’hui ?

J’ai malheureusement pu constater depuis de nombreuses années, et j’en fais encore le constat aujourd’hui, que les femmes n’ont pas été considérées autant que leurs homologues masculins. Je reste persuadée que davantage d’attention et d’estime nous aurait permis d’obtenir de meilleurs résultats. Je pense que l’équipe de France féminine peut aspirer à de belles choses pour l’avenir. La problématique globale reste de faire progresser nos Juniors vers la catégorie Senior, car beaucoup d’entre elles décrochent rapidement. L’équipe Senior a malheureusement peu été renouvelée ces dernières années… Je leur cède ma place en leur souhaitant une belle réussite, mais je sais d’ores et déjà que je peux compter sur ma sœur pour amener cette équipe féminine au plus haut lors des championnats internationaux ! Dans le contexte international, la montée en puissance des Asiatiques (qui s’est encore confirmée en 2014) a bouleversé la domination exercée par les Colombiennes depuis une dizaine d’années. Le niveau est actuellement très élevé et la présence d’individualités comme l’Italienne Francesca Lollobrigida ont redonné un peu de couleur et d’intérêt à cette catégorie féminine.

La saison vient de commencer : garderas-tu un œil sur les résultats de tes ex-concurrentes et ex-coéquipières ?

Je vais bien entendu suivre le déroulement de la saison au fil des courses. Bien qu’éloignée physiquement des pistes, je garderai un œil sur les résultats, d’autant que ma sœur sera encore dans le peloton ! Et puis, peut-être aurais-je l’occasion de venir voir certaines courses… mais uniquement en tant que spectatrice désormais !

La DTN et le comité course te remercient, Justine, pour toutes ces années en Bleu et ton investissement sans faille. Bon vent pour la suite !

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Justine (à gauche) derrière Clémence Halbout (à droite), en Bleu à Rosario