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Nous ne pouvions pas refermer le livre de Rosario sans lui donner la parole. Nous attendions tous, secrètement, qu’il nous fasse vibrer comme à Geisingen lors du championnat d’Europe, mais l’histoire en a voulu autrement. Gwendal Le Pivert, le sprinter de l’équipe de France, a dû assister au spectacle argentin donné par ses coéquipiers sur le bord de la piste, en spectateur, sans avoir pu disputer une seule course… mais en ayant été intensément présent du début à la fin pour soutenir les Bleus ! Récit…

« Entraide, solidarité et détermination : ces trois mots résument l’état d’esprit de l’équipe de France »

Lors de chaque championnat du monde hors d’Europe, ça commence de la même manière : chaque athlète rejoint l’aéroport de Roissy Charles-De-Gaulle depuis les quatre coins de l’Hexagone pour le grand départ, celui que chaque athlète de la formation France attend depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Devant la porte d’embarquement, il règne un parfum à la fois d’excitation, de stress et d’espérance.

Les championnats du monde sont en effet des expériences incroyables mais qui peuvent très rapidement se transformer en cauchemar. Bon nombre d’athlètes en ont fait l’amère expérience dans leur carrière et ont connu une défaillance ou une blessure. Il s’avère que cette année, j’ai tiré le ticket « perdant ».

« Quand on m’a annoncé ma fracture, j’ai ressenti comme un coup de massue »

Le premier événement marquant de ces championnats 2014 a été ma chute, causée à l’entraînement par l’entraîneur chinois, qui m’a fauché aux pieds. Je savais dans l’ambulance qui m’a amené à l’hôpital public de la banlieue de Rosario que s’il m’était annoncé une quelconque fracture, les championnats se terminaient ici. Lorsque le verdict est tombé, j’ai ressenti comme un coup de massue qui anéantissait tous mes rêves construits cette année. La pilule a été très difficile à avaler, et je n’ai pas été le seul à devoir l’ingurgiter. Le DTN, les entraineurs nationaux, le personnel médical et mes coéquipiers l’ont tous avalée : ça n’a pas été simple, mais on l’a tous fait en même temps pour être sûr que ce qui m’était arrivé n’ait aucune incidence sur le reste du championnat et quel championnat…

Ressenti de l’intérieur, le deuxième moment marquant de ces championnats 2014 n’a pas été, comme on pourrait le croire, la première médaille décrochée pour l’équipe de France par Déborah- même si ça a été un moment incroyable et émouvant après l’année qu’elle a vécue. Le deuxième moment significatif aura été le départ du 8ème partant de la finale du 300m des championnats du monde. Nicolas Pelloquin, ce soir-là, a effectué le dernier 300m chronométré de sa carrière. Un moment particulièrement émouvant où toute l’équipe était là, dans les tribunes, pour le soutenir et lui rappeler le patineur qu’il a été. Toutes ces années, Nicolas a été à la recherche du geste parfait, de la meilleure transition possible, d’une bataille continuelle contre le chrono.

« Un moment de pure extase pendant le relais des seniors hommes »

Ensuite, le relais Senior homme piste a été un énorme moment ! Un moment de pure extase où pendant un instant, on avait l’impression qu’il y avait simplement les trois relayeurs et l’équipe autour de la piste. En 6 ans d’équipe de France, je n’ai jamais ressenti ce que j’ai ressenti ce soir-là. L’esprit d’équipe y était au plus fort et nous étions tous soudés derrière ces 3 « larrons » partis décrocher le titre suprême.

Je crois que c’est d’ailleurs cet esprit d’équipe qui a marqué ce championnat 2014. Un esprit solide d’entraide, de solidarité et de détermination.

Ces trois mots (entraide, solidarité et détermination) vont parfaitement résumer la physionomie et la philosophie de l’ultime course des championnats de monde. En effet, le marathon sénior homme illustre l’esprit qu’il régnait en Argentine au sein de l’équipe de France. Cet après-midi-là, nous étions loin, très loin d’une mentalité de « margoulin ». Sous 35°C, les ravitaillements ce sont organisés aux 4 coins du circuit par les membres de l’équipe pour être certain qu’Alexis, Ewen et Elton puissent donner leur maximum jusqu’au dernier mètre de ce marathon.

Dans le dernier tour, toute l’équipe attendait Alexis et Ewen en échappée pour célébrer avec eux un doublé monstrueux en n’espérant qu’une seule chose : voir débouler Elton pour un triplé historique. Et c’est ce qui s’est produit ! La Marseillaise de ce fantastique triplé fut sans aucun doute le moment le plus fort et le plus intense de ces championnats. Tous bras dessus, bras dessous, regroupés au pied du podium, nous chantions la Marseillaise à l’unisson.

Crédit photo : Nathalie Planelles