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Président des Ecureuils d’Amiens de 2004 à 2010, Christophe Verkest est considéré comme l’un des pères fondateurs de notre sport, à l’image d’un Didier Lefebvre, Patrick Moreau ou bien Gilbert Notturno. 

 

Outre le travail en tant que président de club, il a aussi joué un rôle majeur en écrivant parmi les premières lignes journalistiques de l’histoire du roller hockey. Sous l’alias Anthony Hoet, Christophe Verkest a écrit pour Hockey Mag pendant plus de 10 ans, animant une rubrique d’une dizaine de pages avec une parution bimensuelle…

 

Retour en interview sur le rôle de président et de journaliste, mais aussi son point de vue sur la situation actuelle du roller hockey.

 

10 ans de journalisme en roller-hockey, c’est un investissement colossal, étiez-vous bénévole ou bien professionnel ? 

J’étais pigiste pour Hockey Mag. Après, oui, j’étais journaliste professionnel pour le Courrier Picard, dont 15 ans de journalisme sportif. Ma mission principale était de suivre les Gothiques d’Amiens (hockey sur glace). Je les ai suivis un peu partout de la fin des années 1980 à début 1990. Il y avait très peu de spécialiste hockey sur glace. Lorsque Hockey Mag s’est mis en place, je connaissais le rédacteur en chef, et il est allé chercher parmi ses confrères pour faire les différents articles. Hockey Mag a toujours fonctionné avec des pigistes. Après, quand je me suis investi dans le roller, on a décidé d’animer une section roller hockey et j’ai pris en charge toute la rubrique roller du magazine. On faisait entre 8 et 10 pages de roller hockey et c’était à moi de m’occuper de la gestion du contenu.  

 

 

D’où est venue cette envie de couvrir le roller hockey?

Très honnêtement, je ne m’en souviens plus trop… J’avais fait quelques articles pour le Courrier Picard au début du sport dans la région d’Amiens. Il y avait une grande culture hockey à Amiens, et j’ai toujours été passionné par les nouveaux sports. 

En écrivant ces articles, ça a permis au sport de se faire connaître dans la région et de donner l’opportunité à des gens de commencer le hockey. Ça a permis d’attirer des gens qui n’avaient pas forcément accès à la glace ou à qui les portes du hockey sur glace étaient fermées. Même si le matériel restait un investissement, c’était beaucoup moins cher que son cousin. Quand mes enfants se sont retrouvés à Amiens, j’entendais beaucoup de gens critiquer et je me suis dit que j’allais aider à la place. D’où l’idée aussi de m’impliquer dans le club en tant que dirigeant. 

Avec le développement de la discipline, Hockey Mag s’est posé la question de la couverture et d’en faire quelques articles, et vu que j’étais un des seuls à connaître le sport, c’est moi qui m’en suis tout naturellement occupé. 

 

 

Un mot sur vos années de président ?

J’ai été dix, onze ans dirigeant du club, avec 6 années de présidence de 2004 à 2010. Je suis arrivé au club en 1999 et j’y ai fait 5 ans en tant que dirigeant avant de devenir président. Après 6 ans de présidence, j’avais émis le souhait de partir, puisque j’estimais qu’il était important de faire tourner les responsabilités pour insuffler de nouvelles dynamiques. J’ai fait une dernière année en tant que dirigeant l’année suivant, puis j’ai décidé d’arrêter complètement.

 

À l’image de Didier Lefebvre ou bien Patrick Moreau et Gilbert Notturno, vous faites partie des Pionniers du sport…

On avait une vision très différente avec Didier, même si j’ai été admiratif de ce qu’il a fait. J’avais une vision plus sociale du club et du roller hockey. Nous n’avons jamais eu un joueur payé au sein du club. On a eu un seul salarié en la personne de Renaud Crignier, qui avait pour mission d’encadrer le club et d’entraîner. 

Je voulais rendre la pratique du roller hockey le plus accessible possible. Le matériel reste onéreux, et on avait mis en place une politique, où l’argent qu’on avait, était placé sur les catégories jeunesses. Par exemple, les jeunes qui arrivaient au baby roller, avaient le droit au prêt du matériel. La seule chose que nous demandions aux familles, était les patins. 

Et puis avec ma double casquette de journaliste et de dirigeant/président, je me suis pas mal impliqué dans les débuts. C’était un peu la genèse et on a fait partie des gens, qui ont débroussaillé les débuts du sport…

 

 

Pourquoi l’alias dans les articles ?

J’ai utilisé un alias une fois que je suis devenu président des Ecureuils d’Amiens. Je ne voulais pas qu’on confonde les deux fonctions. Lorsqu’il y avait de la demande pour Amiens, je ne le faisais pas. Je déléguais à un collègue. J’estimais qu’en tant que président, je ne pouvais pas écrire sur mon propre club. Les rares fois où cela est arrivé, c’était sur les articles bilan de saison.

 

Vous avez vu le sport se structurer et évoluer de zéro, à ce qu’il est aujourd’hui… Quel regard portez-vous sur le sport aujourd’hui ?

Je suis épaté de ce qu’il est devenu, quand on regarde d’où il vient. C’est juste 20 ans, c’est à la fois beaucoup et en même temps peu… On a encore beaucoup à faire, notamment au niveau des structures. Je vois mon fils à Cherbourg et le gymnase dans lequel il joue, c’est dommage…

À Amiens, ça a été une longue lutte pour un gymnase digne de ce nom. Pour certaines structures, il y a des équilibres encore fragiles.

Par contre, quand je vois tout ce qui a été mis en place, un championnat élite, et une Nationale 1 à 2 poules, qui fonctionnent bien, une Nationale 2, une Nationale 3, et des championnats régionaux, le sport a eu une poussée extraordinaire. Après, c’est comme l’adolescence, quand ça pousse vite, ça peut générer d’autres problèmes. Il y a des problématiques partout, et il y en aura d’autres, c’est normal. 

J’ai toujours cru au développement de ce sport. Je l’aime beaucoup, il est fun et spectaculaire à la fois. Son gros avantage est de pouvoir être joué dans des structures plus modestes et plus faciles à mettre en place par rapport à son cousin sur glace. Qu’on se le dise, certaines communes n’auront jamais de patinoire et avec le roller hockey, ils ont pu accueillir du hockey. Quand je pense qu’en Normandie, une ville de 3000 habitants comme Donnay a du hockey, c’est juste incroyable. Le roller hockey a réussi à se développer dans des communes où il n’y aura jamais de hockey sur glace. 

Maintenant, le plus gros souci reste toujours les infrastructures. Ça reste tout de même un certain investissement. Quand il faut plaider ça auprès des collectivités locales, ce n’est pas toujours simple. Plus le sport se développera et plus ce sera « facile ». On aura une certaine légitimité. Au tout début, quand on allait demander quelque chose auprès des collectivités ou sponsors, les gens se demandaient, « c’est qui ces gens qui poussent un palet sur des patins à roulettes… » Maintenant on peut s’appuyer sur la FFRS, les cahiers des charges, et tout le travail de structuration de la Fédération ne sont en aucun cas des contraintes, mais un cadre qui nous a permis d’évoluer et d’aller mieux plaider la cause auprès des élus. 

 

En regardant dans le passé, est-ce qu’il y a des moments clé dans l’histoire du sport ? 

Je dirais qu’il y en a un, qui sort du lot et ça n’a pas été simple, mais ça a été la création d’un vrai championnat sous une forme d’aller-retour. Si mes souvenirs sont bons, c’était à Amiens en 2000 lors des championnats du monde. C’était un vrai pari. On devait partir avec 8 équipes, et finalement le championnat a démarré à 7 avec les clubs historiques qu’on connaît comme Rethel, Angers, Grenoble, Amiens, mais aussi Viry. Je pense que c’est là où le sport a décollé.

Après, ça a plus été des évolutions progressives et permanentes. Je pense qu’il fallait se jeter à l’eau et on l’a fait avec ce championnat. J’ai suivi cette construction de l’extérieur, puisque je n’étais pas président à ce moment. C’est cette base de championnat, qui a permis de créer les catégories inférieures. Pour cet accord, il y avait Didier Lefebvre, Patrick Moreau, Patrick Dargent, et ils se sont tous mis d’accord à ce moment. En découle toutes les structurations qu’on connaît aujourd’hui et c’est ça le moment fondateur à mes yeux.

 

Aujourd’hui l’avènement des étrangers au détriment de la formation en Ligue Elite, et parfois dans certaines catégories inférieures, est critiqué, est-ce que vous avez de l’espoir pour le sport ?

Je ne suis pas pessimiste. Il y aura des cris et des pleurs. Je compare ça au hockey sur glace français. Ce dernier est rempli d’histoires de dépôt de bilan et il y en a encore… Pour avoir suivi beaucoup de sport dans ma carrière, certains dirigeants perdent parfois pied avec la réalité et mettent la charrue avant les bœufs. Pendant mes années de président, j’estimais qu’on ne pouvait pas dissocier les résultats de l’équipe première de la formation et des résultats des catégories jeunesses. Une équipe première est importante pour l’image qu’elle porte. C’est la locomotive et elle donne l’envie aux jeunes, mais aussi elle permet d’être attractive auprès des différents partenaires et collectivités territoriales. Après, il ne faut pas le faire à n’importe quel prix.

Des exemples en roller hockey, il en existe. La Roche sur Yon est arrivée aussi vite qu’elle est repartie, mais ça n’a pas empêché le sport de se développer. Peut-être qu’un jour, il faudra en arriver à un contrôle des budgets comme à la glace, mais ils ont un plus grand passé que le nôtre. On ne pourra jamais empêcher les gens de faire ce qu’ils veulent.  

Après, pour les étrangers, je suis loin d’être contre. Le bon exemple, c’est ce qu’a fait Didier à Rethel. Beaucoup disaient qu’ils allaient se casser la tronche, et qu’ils dépensaient de l’argent qu’ils n’avaient pas. Ça ne les a pas empêchés d’avoir des jeunes aussi. Didier avait une forte personnalité. Il ne faut pas tout mettre sur l’Elite. Le sport, c’est l’envie de progresser pour gagner, mais il faut travailler pour trouver le bon équilibre. Pour le moment, ça n’empêche pas le sport d’évoluer. Après, il y aura des écueils et c’est normal, mais je crois vraiment en ce sport !

 

Avec ce que fait votre fils à Cherbourg, est-ce que vous voyez une différence par rapport à la formation ?

Je discute régulièrement avec lui et j’aide aussi un peu à Cherbourg. Antoine a grandi dans cette ambiance et aujourd’hui il est passé de l’autre côté. Quand je vois ce qui se met en place, ça s’est bien développé. On a souvent eu le débat sur les joueurs de glace, qui arrivent en fin de saison, mais aujourd’hui, c’est beaucoup moins vrai. Le niveau global des jeunes est en progression et plus il y aura de jeunes, plus les clubs se structureront, et plus il y aura des entraîneurs qualifiés et mieux ce sera. 

À l’époque, des joueurs de roller hockey, ça n’existait pas. Aujourd’hui, on voit arriver les premiers cadres, qui ont fait toute leur carrière dans le roller hockey. Après, il ne suffit pas d’être bon joueur pour être un bon entraîneur, mais on a un vivier de gens qui peuvent prétendre à faire du bon travail. En général, les entraîneurs sont souvent des anciens joueurs, et au début, on n’en avait pas, donc ils venaient de la glace. Aujourd’hui, c’est plus facile, même si ça reste compliqué de trouver des entraîneurs, qui soient capables d’entraîner et d’apporter une vraie culture du roller hockey. Quand je vois les systèmes de jeu qu’Antoine peut mettre en place, ce sont des systèmes propres au roller hockey et non à la glace.  

 

À votre avis, quels sont les axes à améliorer pour notre sport ? 

À Amiens, la couverture du roller hockey, c’est peanuts… Quand je vois ce que fait Cherbourg pour le club, c’est vraiment sympa. Finalement, dans une grande ville avec une culture sportive, c’est beaucoup plus difficile.

Je ne pense pas qu’il y ait de recette miracle. On est un peu dans une position, où le serpent se mord la queue. Pour avoir une bonne visibilité, il faut attirer les médias et pour les attirer, il faut une bonne visibilité. Je ne pense pas qu’il faille mettre la charrue avant les bœufs. Il faut continuer à se structurer et se développer. On se doit de donner l’image la plus professionnelle possible. Tant qu’on jouera dans des salles et gymnases ne pouvant accueillir qu’entre 100 et 200 personnes, on aura encore du mal. 

J’ai le souvenir de dire à Renaud, ou même à mon fils : « quand un journaliste vous appelle, vous vous devez de le rappeler et de lui répondre ». Un journaliste a des deadlines et a besoin de l’information tout de suite. Il faut lui donner le tapis rouge et se montrer professionnel et faire toutes les choses avec professionnalisme. 

Rien n’arrive du jour au lendemain… Il faut continuer à travailler. Quand je vois comment le hockey sur glace continue à parfois éprouver des difficultés, il faut aussi qu’on reste lucide. 

 

De vos années de présidence, comment pensez-vous avoir mis la pierre à l’édifice du roller hockey français ?

À mes yeux, c’est la structuration du club d’Amiens, l’emploi de Renaud, et d’avoir pérennisé son poste pendant 10 ans. La création des sections loisirs, qui nous ont ramené des licenciés très importants, qui se sont impliqués dans la vie du club. Ils ont apporté des enfants, mais aussi des sponsors. Il faut faire en sorte d’impliquer les gens dans la gestion d’un club. Il faut éviter qu’un club ne tourne que sur le dos d’une seule personne. Sinon, le jour où cette personne s’arrête, la survie de la structure est en péril. 

Je dis souvent, que ma plus grande fierté, c’est ce qui s’est fait quand je n’y étais plus. C’est à dire, qu’on a dû bâtir des choses suffisamment solides, parce que le club existe toujours. Malgré la descente en Nationale 1, le club est toujours debout et avec des équipes jeunesses. 

Oui ce serait ça à mes yeux…

 

Aujourd’hui, ses valeurs sociales et sportives continuent d’être transmises par le biais de son fils, Antoine Verkest, ancien joueur Elite des Ecureuils d’Amiens, et actuel entraîneur-joueur des Vikings de Cherbourg, où il est aussi à la tête d’un « sport-étude ».